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Choux de Siam
9 juillet 2007

Faire de même

  • Les 31 écoles alternatives du Québec sont en campagne ces jours-ci pour convaincre la ministre de leur permettre de conserver leurs bulletins. Une lettre a été envoyée en ce sens la semaine dernière à la ministre de l'Éducation, et les parents de chacune des écoles sont invités à faire de même. (Clairandrée Cauchy.)

Le verbe faire peut très bien se substituer à un autre verbe, mais les deux doivent être employés à la même forme : faire, verbe actif, ne saurait remplacer le passif a été envoyée. Je proposerais :

... Elles ont envoyé une lettre en ce sens [...] et les parents de chacune des écoles sont invités à faire de même.

Line Gingras
Québec

«Le bulletin uniforme est contesté» : http://www.ledevoir.com/2007/06/20/147949.html

11 juillet 2007

Incomber une responsabilité à quelqu'un

Incomber une responsabilité; incomber quelque chose à quelqu'un; incomber + complément d'objet direct; grammaire française; syntaxe du français.

  • On peut quand même se demander s'il regrette aujourd'hui de ne pas en avoir incombé la responsabilité aux partis d'opposition, l'an dernier. (Norman Spector.)

Le verbe incomber n'admet pas de complément d'objet direct; il ne peut pas non plus avoir pour sujet un nom (ni un pronom) désignant une personne. On ne saurait donc incomber une responsabilité à quelqu'un.

Par contre, on peut très bien dire qu'une responsabilité - ou une charge, une obligation - incombe à quelqu'un ou à une collectivité (lui revient, lui appartient, lui est imposée) :

Les devoirs et les responsabilités qui lui incombent. (Petit Robert.)

Ces réparations incombent au propriétaire de la maison. (Lexis.)

Mme Tassy connaît l'obligation qui incombe aux maisons des morts d'avoir à tenir table ouverte. (Hébert, dans le Lexis.)

En fait, c'est aux États-Unis qu'appartenait la décision, puisque l'effort principal leur incombait dorénavant. (De Gaulle, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Le Petit Robert et le Trésor reçoivent également le tour impersonnel il incombe à quelqu'un de + infinitif :

En sa qualité de père et d'éducateur, il lui incombait de dénoncer la flatterie en général comme une pratique des plus détestables. (Aymé, dans le Trésor.)

Dans la phrase à l'étude, monsieur Spector a peut-être voulu dire :

... de ne pas en avoir fait retomber la responsabilité sur les partis d'opposition...

... de ne pas en avoir rejeté la responsabilité sur les partis d'opposition...

Line Gingras
Québec

«Rester en Afghanistan» : http://www.ledevoir.com/2007/07/12/150136.html?fe=1480&fp=127439&fr=30453

21 juillet 2007

Fi donc

  • D'ailleurs, son portrait d'homme blessé (dans son orgueil) est d'une si grande violence, frôlant même la stupidité - dans une scène plutôt absurde, cet opérateur de steadicam veut imposer ses idées visuelles au réalisateur d'une pub de voiture, faisant fi de la hiérarchie du cinéma et les lois implacables du marketing télévisé... -, ce qui freine nos élans de sympathie devant ses déboires financiers et ses troubles émotionnels. (André Lavoie.)

On a le choix entre deux constructions :

D'ailleurs, son portrait d'homme blessé (dans son orgueil) est d'une si grande violence [...] qu'il freine nos élans de sympathie...

D'ailleurs, son portrait d'homme blessé (dans son orgueil) est d'une grande violence [...], ce qui freine nos élans de sympathie...

* * * * *

... faisant fi de la hiérarchie du cinéma et des lois implacables du marketing télévisé...

Line Gingras
Québec

«La vie de famille dans la Ville éternelle» : http://www.ledevoir.com/2007/07/20/150863.html

4 août 2007

En est un de, en est un en

En est un en; en est un de; syntaxe; anglicisme; calque de l'anglais.

  • Le marché des boissons énergisantes en est un en constante évolution. (Fabien Deglise.)

La construction en est un de... est donnée comme anglicisme dans le Colpron :

* La question en est une d'importance. (= C'est là une question importante.)

* Notre attitude en est une de collaboration. (= Notre attitude est celle de la collaboration.)

Les linguistes de l'Office québécois de la langue française y voient eux aussi un calque de l'anglais. (Banque de dépannage linguistique : http://66.46.185.79/bdl/gabarit_bdl.asp?Th=3&id=2450.)

Doit-on également se méfier de en est un en...? Ce tour ne me paraît pas plus idiomatique. Par curiosité, j'ai tapé dans Google «is one in constant evolution»; j'ai obtenu un texte de l'OTAN :

Mr Çandar emphasized that the phenomenon of political Islam was not a new phenomenon but has always been a part of the political culture of the Muslim world and it is one in constant evolution.
http://www.nato-pa.int/Default.asp?CAT2=909&CAT1=743&CAT0=2&COM=939&MOD=0&SMD=0&SSMD=0&STA=&ID=0&PAR=0&LNG=0

M. Çandar souligne que le phénomène d'un islam politique n'est pas nouveau, mais qu'il a toujours fait partie de la culture politique du monde musulman et qu'il est en constante évolution.
http://www.nato-pa.int/Default.asp?CAT2=909&CAT1=743&CAT0=2&COM=939&MOD=0&SMD=0&SSMD=0&STA=0&ID=0&PAR=0&LNG=1

Au mieux, la construction à l'étude est inutile, mais je pense qu'il s'agit bien d'un anglicisme; on aurait pu écrire, tout simplement :

Le marché des boissons énergisantes est en constante évolution.

Line Gingras
Québec

«Les boissons énergisantes sur la sellette» : http://www.ledevoir.com/2007/08/04/152429.html

6 août 2007

Différent ou différend?

Différend ou différent; homonymes; orthographe.

  • ... le groupe Rabaska leur a proposé d'oublier cette somme en échange d'un engagement à ne plus jamais évoquer publiquement le différent portant sur le zonage. (Guillaume Bourgault-Côté.)

Le «[d]ésaccord résultant d'une différence d'opinions, d'une opposition d'intérêts entre deux ou plusieurs personnes» (Petit Robert) est un différend.

Line Gingras
Québec

«De la nécessité de protéger la parole» : http://www.ledevoir.com/2007/08/04/152373.html

7 août 2007

Négligence excusable?

  • Les machines, qui ne sont pas tout à fait des guichets bancaires puisqu’ils ne permettent pas___ retirer de billets... (Tristan Péloquin.)

Le pronom ils ne remplace pas guichets bancaires, puisque ces guichets, justement, permettent de retirer des billets; il renvoie plutôt à machines, féminin pluriel.

Et le verbe permettre, suivi d'un infinitif complément, s'emploie avec la préposition de.

Tout le monde le sait? Oui, tout le monde le sait - enfin, je le suppose. Mais cela ne dispense personne de se relire; et les professionnels de l'écriture, à cet égard, doivent donner l'exemple. Dans le cas présent, la négligence ne peut s'excuser ni par l'urgence de la nouvelle, ni par la situation périlleuse où se trouverait le journaliste.

La forme du message doit correspondre au contenu.

J'apprécie le naturel, et plus qu'un soupçon de désinvolture à l'occasion; l'erreur est humaine, je ne le sais que trop; mais j'ai horreur du laisser-aller.

* * * * *

Note du 8 août 2007, à 2 h 40 : Monsieur Péloquin a remplacé le pronom ils par elles; apparemment il n'a pas cru bon d'introduire l'infinitif complément du verbe permettre au moyen de la préposition de, toutefois. Celle-ci est pourtant toujours utilisée en français correct, comme on s'en rendra compte en consultant, à l'article «permettre», le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Hanse-Blampain, le Lexis, le Trésor de la langue française informatisé, le Colin, le Girodet ou le Thomas.

Line Gingras
Québec

«Des guichets automatiques dans les églises. Alléluia!» : http://blogues.cyberpresse.ca/peloquin/?p=247

9 août 2007

Dénoter

  • «À mon sens, l'élément le plus important de cette étude, c'est qu'on ne dénote aucun avantage à utiliser ce genre de vidéos. On voit même que cela peut nuire à l'apprentissage des jeunes enfants», précise le professeur Frederick Zimmerman, de l'Université de Washington (UW). (Louise-Maude Rioux Soucy.)

D'après ce que je vois dans les dictionnaires généraux que j'ai sous la main, dénoter ne veut pas dire «noter», «remarquer», «déceler», mais plutôt «indiquer, désigner par quelque caractéristique» (Petit Robert), «être le signe de quelque chose» (Trésor de la langue française informatisé). Dans la langue courante, le sujet désigne une chose :

Les traces qui dénotent le passage de quelque chose ou de quelqu'un. (Trésor.)

Les frissons qui dénotent la fièvre. (Trésor.)

Son attitude dénote un certain courage. (Petit Robert.)

Des aquarelles qui dénotent un grand talent. (Multidictionnaire.)

[Toutes ces peintures] dénotaient de la façon la plus évidente, pour un œil exercé, la plus belle période de l'art égyptien. (Gautier, dans le Petit Robert.)

La journaliste (je présume que les propos de monsieur Zimmerman ont été traduits) aurait pu écrire :

... l'élément le plus important de cette étude, c'est qu'on ne remarque aucun avantage à utiliser ce genre de vidéos.

... l'élément le plus important de cette étude, c'est qu'elle ne signale aucun avantage à utiliser ce genre de vidéos.

Line Gingras
Québec

«La télé éducative au berceau, un leurre?» : http://www.ledevoir.com/2007/08/08/152750.html

10 août 2007

Décès d'une baleine

  • Les fréquentes collisions avec de grands navires constituent sans contredit la plus grande cause de mortalité. En fait, la moitié des décès de baleines noires survenus au cours de la dernière décennie sont attribuables à des rencontres malheureuses avec des bateaux. (Alexandre Shields.)

D'après le Petit Robert, le Multidictionnaire, le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé, décès, terme de la langue administrative et juridique, s'emploie uniquement à propos de la mort d'une personne :

J'ai été à la mairie, mais on n'a pas trouvé trace du décès d'un nommé Mouilleminche. (Queneau, dans le Lexis.)

... le peuple français, en moyenne le plus vieilli, le seul où, depuis le début du siècle, les décès l'aient constamment emporté sur les naissances... (De Gaulle, dans le Trésor.)

Il faudrait reformuler :

Les fréquentes collisions avec de grands navires constituent sans contredit le danger le plus important. En fait, la moitié des baleines noires qui sont mortes au cours de la dernière décennie ont eu une rencontre malheureuse avec un bateau / ont succombé à un tel accident. [Le verbe heurter est employé plus loin.]

Line Gingras
Québec

«Le géant à bout de souffle» : http://www.ledevoir.com/2007/08/09/152866.html

12 août 2007

Le problème ou la solution?

  • Chose certaine, la solution à ce vieux problème du pouvoir fédéral de dépenser - une disposition du défunt accord du Lac-Meech de 1987 y était consacrée - n'a pas à être constitutionnalisé dans un premier temps, a précisé M. Charest... (Antoine Robitaille, avec la collaboration d'Hélène Buzzetti.)

Qu'est-ce qui n'a pas à être constitutionnalisé? Pas le problème, mais la solution : le participe passé employé avec être doit s'accorder avec le sujet du verbe, au féminin singulier.

  • Les libéraux en herbe, qui ont fait de l'identité québécoise un des thèmes centraux de leur congrès, exploreront aussi l'idée de mettre en place un «cours d'initiation à la réalité nationale» pour mieux intégrer les immigrants, dont, au reste, il souhaite doubler le nombre d'ici cinq ans.

Il souhaite? Qui cela, il? Je ne vois pas d'autre possibilité que les libéraux en herbe : ils souhaitent.

Line Gingras
Québec

«Charest veut discuter dépenses avec Ottawa seulement» : http://www.ledevoir.com/2007/08/08/152752.html

13 août 2007

Une gifle en plein visage

  • Risque de fermeture, activités réduites, c'est une gifle en plein visage qu'ont reçu les organismes culturels en apprenant que le gouvernement fédéral ne leur accordait pas de subvention pour engager des étudiants. (Marie-Ève Lafontaine.)

Le participe passé employé avec l'auxiliaire avoir s'accorde avec le complément d'objet direct, si celui-ci précède le verbe. Les organismes culturels ont reçu quoi? Pas un visage, mais une gifle : qu'ont reçue.

Line Gingras
Québec

«Subventions coupées : les organismes culturels durement touchés» : http://www.cyberpresse.ca/article/20070518/CPNOUVELLISTE/705180652/-1/CPNOUVELLISTE

14 août 2007

Ces individus...

  • ... ces individus ont été condamnés à mort à deux reprises. La première fois fut en 2001. On souligne ce fait afin que l'on sache que, depuis lors, leur santé psychologique s'est passablement dégradée. Car, on le répète, elles n'ont rien fait de répréhensible... (Serge Truffaut.)

Individus est un nom masculin, même lorsqu'il désigne cinq infirmières... et un médecin; le pronom qui le remplace doit être du même genre :

Car, on le répète, ils n'ont rien fait de répréhensible...

Line Gingras
Québec

«L'escroc libyen» : http://www.ledevoir.com/2007/07/13/150287.html

16 août 2007

Indication de la date

Date; place de l'article dans l'indication de la date.

  • Sœur Estelle Lauzon, religieuse de la congrégation de la Providence, a été assassinée lundi le 13 août dans le centre d'hébergement où elle travaillait... (Jean-Guy Roy, directeur général de CIRA-FM.)

On doit mettre l'article devant le jour de la semaine, et non après :

... a été assassinée le lundi 13 août...

Voir au besoin le Multidictionnaire ou Le français au bureau.

Line Gingras
Québec

«Lettres : Mourir au combat» : http://www.ledevoir.com/2007/08/16/153493.html

19 août 2007

Des gens subtiles

Subtil, subtile; subtils, subtiles; accord de l'adjectif après gens; démollir ou démolir; grammaire française; orthographe.

  • ... les militaires n'ont pas la réputation d'être des gens très subtiles, ni rapides d'esprit. (Michel Vastel.)

L'adjectif qui se rapporte au mot gens, s'il est placé après le nom, doit se mettre au masculin : ... des gens très subtils...

  • Dans son premier mandat, Robert Bourassa se laissait aller à la même familiarité, et il l'a payé très cher lorsque les mêmes journalistes ont décidé de le démollir parce qu'ils jugeaient qu'ils l'avaient assez vu.

Démolir. Rien à voir avec les fromages à pâte molle.

  • Ce ne sont pas «que» deux exemples de parages des journalistes. Je trouve que mes collègues se laissent un peu trop aller ces temps-ci et les exemples ne manquent pas.

Ça dépare sans doute, mais monsieur Vastel a voulu dire rapages. J'ajouterais que le laisser-aller peut se manifester de bien des façons...

Line Gingras
Québec

«Certains journalistes sont effrontés!» : http://forums.lactualite.com/advansis/?mod=for&act=dip&pid=11920&tid=11920&eid=1&so=1&ps=0&sb=1

21 août 2007

Laisse passé les gaz

Laisse passé ou laisse passer; infinitif ou participe passé; grammaire française; orthographe.

  • En février 2003, une fissure sur le bouclier protégeant une des ailes de Columbia avait laissé passé des gaz brûlants... (Associated Press.)

Passer doit se mettre à l'infinitif; pour s'en assurer, il suffit de le remplacer par un verbe qui ne se prononce pas de la même manière à l'infinitif et au participe passé : avait laissé fuir.

Line Gingras
Québec

«Un trou dans le gant d'un astronaute d'Endeavour» : http://www.cyberpresse.ca/article/20070815/CPSCIENCES/70815147/-1/CPSCIENCES

23 août 2007

Opérationel ou opérationnel?

Opérationel ou opérationnel; force opérationelle ou force opérationnelle; lieutenant colonel ou lieutenant-colonel; orthographe; anglicisme.

  • ... la force opérationelle canadienne en Afghanistan... (Claude Lévesque.)

L'anglais operational s'écrit avec un seul n, mais le français opérationnel en prend deux : la force opérationnelle.

  • ... la lieutenant colonel Bridget Rose...

D'après TERMIUM et le Petit Robert, on écrit lieutenant-colonel avec un trait d'union.

  • Vendredi dernier, deux autre_ militaires canadiens...
  • «Pour moi, il s'agit d'une cause noble, d'une mission noble. Il faut envoyer un message de solidarité à l'occasion de cette tragédie nationale. Mes pensée_ vont aux familles», a dit le critique du Parti libéral du Canada en matière de défense, Denis Coderre.

Line Gingras
Québec

«Journée noire à Kandahar» : http://www.ledevoir.com/2007/08/23/154305.html

24 août 2007

Belle reconnaissance

  • C’est avec tristesse que nous apprenons le décès de deux soldats canadiens en Afghanistan. L’ensemble de la population canadienne est fière de ces compatriotes exceptionnels et reconnaissants des sacrifices qu’ils ont consentis. (Stephen Harper, premier ministre du Canada.)

Cette déclaration paraîtrait plus sincère si on n'attribuait pas le sentiment de gratitude aux compatriotes exceptionnels - les deux soldats qui ont été tués -, mais à la population : reconnaissante.

Distraction? Montrez-moi que j'ai tort d'appeler cela de l'indifférence.

Line Gingras
Québec

Déclaration du premier ministre : http://www1.pm.gc.ca/fra/media.asp?id=1801

26 août 2007

Prendre en compte

Prendre en compte; pris en compte; prise en compte; to take into account.

  • À lire ces conversations entre un sociolinguiste et son disciple de la Nouvelle Revue française, on sera interpellé par l'optimisme qui défend le multilinguisme, sans prendre en compte la disparition que ces transformations sous-tendent. (Guylaine Massoutre.)

Une lectrice m'interroge sur l'expression prendre en compte, de plus en plus fréquente. Faut-il y voir l'influence de l'anglais? Devrait-on l'éviter? A-t-elle un sens différent de tenir compte (de)?

En 1985, j'ai rédigé une étude sur prendre en compte pour la série de fiches Repères - T/R, que produisait le Bureau de la traduction de l'administration fédérale. J'ai consulté alors quatre-vingt-treize ouvrages et n'ai trouvé cette locution, au sens de prendre en considération, que dans le Grand dictionnaire encyclopédique Larousse; les dictionnaires Bordas la donnaient également, mais avec une autre acception. Prendre en compte était déjà adoptée par certains auteurs; elle me paraissait en voie de passer de la langue des affaires dans la langue courante - sans doute sous l'influence de l'anglais to take into account et en raison de sa ressemblance formelle avec les deux tours synonymes prendre en considération et tenir compte de. J'estimais prudent, néanmoins, de ne pas encore la considérer comme reçue dans le bon usage, vu son absence des dictionnaires de langue.

Qu'en est-il aujourd'hui? L'expression prendre en compte est admise sans réserves dans le Petit Robert (à l'article «compte»), dans le Trésor de la langue française informatisé (à l'article «prendre») et dans le Multidictionnaire. D'après ce que je peux voir, elle est utilisée dans le même sens que prendre en considération et tenir compte de :

Cet aspect du problème devra être pris en compte. (Petit Robert.)

Nous devons prendre en compte cette nouvelle réalité. (Multidictionnaire.)

Plus courte que prendre en considération, elle est en outre plus facile à manier que tenir compte de...

Line Gingras
Québec

«Littérature française - Cibles en mouvement» : http://www.ledevoir.com/2007/06/09/146762.html

27 août 2007

Aire post-glaciaire

Aire glaciaire; aire ou ère; post-glaciaire ou postglaciaire; le préfixe post; homonymes; trait d'union; orthographe.

  • C'est une toute petite plante vivace, presque invisible aux yeux des néophytes. L'astragale de Robbins, variété de Fernald, est pourtant une vraie survivante. Rescapée de l'aire post-glaciaire aujourd'hui rarissime, on ne peut l'observer au Québec qu'à Blanc-Sablon. (Alexandre Shields.)

D'après le Petit Robert et le Multidictionnaire, l'aire est une surface, un territoire; monsieur Shields, sans doute, a voulu dire ère, au sens de «division la plus grande des temps géologiques». Or, toujours selon le Petit Robert, chaque ère géologique est subdivisée en périodes, époques et âges - et suivant ce que je vois aux articles «glaciaire» et «postglaciaire», il faudrait parler ici non pas d'ère, mais de période. Toutefois je ne suis pas spécialiste de ces questions...

Il convient de noter, par ailleurs, que postglaciaire est écrit sans trait d'union dans le Petit Robert; c'est également la graphie que recommande le Multidictionnaire : «Les mots composés du préfixe post- s'écrivent en un seul mot, à l'exception de l'adjectif post-traumatique et des expressions latines. Postsynchronisation, post-scriptum.»

Line Gingras
Québec

«Sauver l'astragale» : http://www.ledevoir.com/2007/08/27/154743.html

30 août 2007

Génèse

Génèse; orthographe.

  • ... aucun conflit adulte ne trouve sa génèse ailleurs. (Amélie Nothomb, Le sabotage amoureux; passage cité [textuellement?] dans l'édition canadienne de Sélection, septembre 2007, page 33.)

Le substantif genèse s'écrit sans accent aigu :

Genèse d'une œuvre d'art. (Petit Robert.)

Line Gingras
Québec

1 septembre 2007

Bien à vous

Bien à vous; truly yours; yours truly; anglicisme; calque de l'anglais.

Monsieur Julien utilise souvent l'expression bien à vous, mais il a un doute : «Est-elle vraiment usitée?» me demande-t-il.

Selon le Multidictionnaire et le Colpron, la formule de salutation bien à vous serait le calque de truly yours ou yours truly.

Cette expression est toutefois admise dans Le français au bureau, de l'Office québécois de la langue française - même s'il faut la réserver «aux notes et aux courriels qui ont un caractère personnel».

Elle est également reçue dans le Trésor de la langue française informatisé. À l'article «bien», je trouve bien à vous comme «formule de politesse à la fin d'une lettre». À l'article «être», on donne les précisions suivantes : «La formule familière de conclusion épistolaire, je suis (bien) à vous, est généralement employée sans la copule [c'est-à-dire sans le verbe être].»

Il me semble donc que l'on peut se servir de l'expression bien à vous, dans certains contextes.

Line Gingras
Québec

3 septembre 2007

Il s'est fait pasteurisé

S'est fait + infinitif ou participe passé; se faire + infinitif ou participe passé; grammaire française; orthographe.

  • «Bob s'est fait pasteurisé», a-t-elle lancé. (Bob Baddeley; extrait d'une anecdote amusante publiée dans l'édition canadienne de Sélection, septembre 2007, page 78.)

Le pronominal se faire doit être suivi non pas du participe passé, mais de l'infinitif :

Elle s'est fait prendre.
Va te faire cuire un œuf!
Ils se sont fait voir ensemble.

Bob s'est donc fait «pasteuriser».

Line Gingras
Québec

4 septembre 2007

Mise en relief

Mise en relief; c'est, ce sont; accord du verbe être; noyau d'un syntagme; le noyau et ses compléments; grammaire française; syntaxe du français; orthographe d'accord.

  • Ces accommodements raisonnables, que la population associe maintenant à l'immigration et rejette en bloc, ce ne sont certainement pas l'aménagement de toilettes pour handicapés ou de rampes d'accès pour les fauteuils roulants. (Denise Bombardier.)

Le déterminant ou pronom démonstratif ce s'emploie avec le verbe être pour mettre en relief un élément de la phrase - dans ce cas-ci, l'aménagement de toilettes ou de rampes d'accès. Le substantif aménagement, même s'il avait trente-six compléments, ne resterait pas moins le noyau du syntagme, et commanderait à ce titre l'accord du verbe au singulier :

... ce n'est certainement pas l'aménagement de toilettes pour handicapés ou de rampes d'accès pour fauteuils roulants.

Cela dit, la phrase serait plus logique si au moins deux éléments étaient mis en relief, comme exemples d'accommodements :

Ces accommodements raisonnables, que la population associe maintenant à l'immigration et rejette en bloc, ce ne sont certainement pas l'aménagement de toilettes pour handicapés ou la construction de rampes d'accès pour fauteuils roulants.

Noter que le verbe être, dans ce cas, se mettrait de préférence au pluriel, mais que le singulier ne serait pas incorrect. (J'ai consulté à ce sujet le Hanse-Blampain, à l'article sur l'accord du verbe.)

Line Gingras
Québec

«Accommodements dans la confusion» : http://www.ledevoir.com/2007/09/01/155283.html

5 septembre 2007

Affubler - Prénoms bizarres qu'on affuble aux enfants

Affubler quelque chose à quelqu'un; affubler quelqu'un de quelque chose; construction du verbe affubler; grammaire française; syntaxe du français.

  • Le pays de Hugo Chavez, rocambolesque président du Vénézuela, connaît un drôle de problème : la prolifération de prénoms bizarres qu’on affuble aux enfants. (Patrick Lagacé.)

On affuble quelqu'un de quelque chose (on est affublé, on s'affuble de quelque chose) :

Ces singes que l'on affuble d'une robe. (Jaloux, dans le Petit Robert.)

Anne voulait affubler sa petite sœur d'un chapeau à plumes. (Multidictionnaire.)

Elle était affublée d'une affreuse robe verte. (Lexis.)

Il ne savait pas s'habiller et s'affublait toujours de vêtements trop voyants. (Lexis.)

Affubler quelqu'un d'un nom d'emprunt, d'un sobriquet, d'épithètes ridicules. (Trésor de la langue française informatisé.)

Aucun des dictionnaires que j'ai sous la main ne reçoit la construction affubler quelque chose à quelqu'un. On aurait pu écrire :

... la prolifération de prénoms bizarres dont on affuble les enfants.

* * * * *

« Le projet de loi ne rallie pas tous les habitations de la République bolivarienne du Vénézuela, remarquez. Quelques députés rechignent. »

... tous les habitants...

Line Gingras
Québec

«De drôles de prénoms au Vénézuela» : http://blogues.cyberpresse.ca/lagace/?p=70720342

2 mai 2007

Coordination et changement d'auxiliaire

  • Devant quelques milliers de supporters qui avaient gardé la forme malgré la déconfiture du Front national au premier tour, Jean-Marie Le Pen s'est livré à une dénonciation en règle des deux candidats à l'élection de dimanche et appelé à n'en choisir aucun. (Christian Rioux.)

On peut très bien coordonner les verbes se livrer et appeler. Cependant, comme se livrer se conjugue avec être, et appeler avec avoir, l'auxiliaire ne peut pas rester sous-entendu :

... Jean-Marie Le Pen s'est livré à une dénonciation en règle des deux candidats à l'élection de dimanche et a appelé à n'en choisir aucun.

Grevisse écrit à ce propos : «Il n'est pas conforme au bon usage de ne pas exprimer le second auxiliaire quand il est différent du premier.» (Le bon usage, douzième édition, paragraphe 784, a.)

Line Gingras
Québec

«Présidentielle française - Le Pen appelle à l'abstention massive» : http://www.ledevoir.com/2007/05/02/141753.html?fe=916&fp=127439&fr=17945

12 septembre 2007

Ils, c'est clair?

Ils et son antécédent; l'antécédent du pronom personnel; grammaire française; syntaxe du français.

  • En somme, tout porte à croire que si les médias n'en avaient rien dit, tout ce beau monde se serait tu. Ils sont montés aux barricades et cherchent un bouc émissaire parce qu'ils savent combien le port du niqab ou de la burqa suscite des réactions épidermiques chez la majorité des gens. (Manon Cornellier.)

Ils ne peut avoir, à première vue, qu'un seul antécédent : les médias. Faut-il donc croire que les médias sont montés aux barricades et cherchent un bouc émissaire? En dépit des apparences, ce n'est pas ce que la journaliste a voulu dire - le pronom masculin pluriel remplace en fait tout ce beau monde, masculin singulier. Bien entendu, il serait préférable que la structure de la phrase corresponde de plus près à l'idée que l'on désire exprimer :

En somme, tout porte à croire que si les médias n'en avaient rien dit, tout ce beau monde se serait tu. Les élus sont montés aux barricades et cherchent un bouc émissaire parce qu'ils savent combien le port du niqab ou de la burqa suscite des réactions épidermiques chez la majorité des gens.

Line Gingras
Québec

«Un voile d'hypocrisie» : http://www.ledevoir.com/2007/09/12/156504.html?fe=1990&fp=127439&fr=40532

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