Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Choux de Siam
10 août 2006

Subventionner un budget

Subventionner un budget; usage.

  • Seulement le tiers de son budget de fonctionnement sera subventionné par l'agence de santé et des services sociaux régionale. (Félix-Antoine Lorrain.)

Je lis dans le Petit Robert qu'une subvention, c'est une «aide que l'État, qu'une association (de droit public ou privé) accorde à un groupement, une entreprise, une association» (c'est moi qui souligne); je vois encore, dans le Multidictionnaire, que cette aide peut également être fournie à une personne. D'après les exemples consignés dans ces deux ouvrages de même que dans le Lexis et le Trésor de la langue française informatisé, on peut subventionner, c'est-à-dire «aider financièrement, soutenir par une subvention» (Petit Robert), des collectivités, des organismes, des institutions, des établissements, des écoles, des théâtres; on peut aussi subventionner une recherche, une étude, une mission d'études.

Le Trésor signale un emploi qui relève de l'économie et de la finance - «Accorder une subvention économique pour un produit, un service» :

Réajuster les prix payés aux producteurs, tout en subventionnant les denrées de première nécessité afin de maintenir les tarifs au plus bas... (De Gaulle.)

Aucune des définitions, aucun des exemples que donnent les ouvrages consultés ne me permet de croire qu'il soit correct d'écrire subventionner un budget. Je proposerais :

Seulement le tiers de ses dépenses de fonctionnement seront prises en charge ou sera pris en charge par l'agence de santé et des services sociaux régionale.

Le tiers seulement des sommes nécessaires à son fonctionnement viendra ou viendront de l'agence...

Le tiers seulement des sommes nécessaires à son fonctionnement sera fourni ou seront fournies par l'agence...

Line Gingras

«Vivre ses derniers jours dans la dignité» : http://www.ledevoir.com/2006/08/09/115529.html

9 août 2006

Les gouvernements qui se sont succédés

Se succéder; accord du participe passé du verbe succéder à la forme pronominale; verbe accidentellement pronominal; grammaire française; orthographe d'accord.

  • Fisher se défend d'être nostalgique et amer. Il note que les gouvernements qui se sont succédés depuis 1957 ont fait preuve d'imagination, d'audace et d'initiative. (Manon Cornellier.)

Nous voici à nouveau devant un verbe accidentellement pronominal; en effet, succéder ne s'emploie pas toujours à la forme pronominale (on peut très bien dire, par exemple : Philippe a succédé à son père à la tête de l'entreprise), et le pronom réfléchi, se, peut s'analyser à part (il joue de fait le rôle de complément d'objet indirect, répondant à la question « à qui? »).

Or quelle est la règle, en pareil cas? – Le participe passé d'un verbe accidentellement pronominal s'accorde en genre et en nombre avec le complément d'objet direct, si celui-ci précède le verbe.

Cependant, le verbe succéder n'a jamais de complément d'objet direct : on ne succède pas quelqu'un ni quelque chose, mais à quelqu'un, à quelque chose.

C'est pourquoi le participe passé du verbe succéder, ou se succéder, doit toujours rester invariable. Il fallait écrire :

Fisher se défend d'être nostalgique et amer. Il note que les gouvernements qui se sont succédé depuis 1957 ont fait preuve d'imagination, d'audace et d'initiative.

Line Gingras

« Revue de presse – Les suites d'une crise » : http://www.ledevoir.com/2006/08/05/115259.html

5 août 2006

Gens d'affaire

Gens d'affaires; gens d'affaire; d'affaires ou d'affaire; orthographe.

  • Aucune condamnation des excès israélien_, si ce n'est la suggestion qu'une «prudence extrême» était de mise. (Hélène Buzzetti.)
  • Tout cela leur a valu les réprimandes de personnalités bien placés dans la communauté juive.
  • Ainsi, le couple de gens d'affaire_ Gerry Schwartz (Onex corporation) et Heather Reisman (librairies Chapters) est passé dans le camp conservateur.

D'après les exemples que je vois dans le Petit Robert, le Lexis, le Multidictionnaire, le Hanse-Blampain et le Trésor de la langue française informatisé, consultés à l'article «affaire», il faut écrire d'affaires, avec un s, dans les expressions suivantes :

Voyage, lettre, chiffre, repas, dîner d'affaires.
Agence, cabinet, bureau d'affaires.
Homme, femme, agent, chargé d'affaires.

Le Chouinard traite par ailleurs de l'emploi du mot gens dans l'expression gens d'affaires.

Line Gingras

«Le Canada, Israël et les terroristes» : http://www.ledevoir.com/2006/08/05/115255.html

4 août 2006

L'agenda de Stephen Harper

Agenda; anglicisme; usage.

  • ... le premier ministre s'en est tenu à la routine : pourfendre les libéraux et vanter son gouvernement. Le message était clair : c'est lui qui dicte l'agenda, pas l'électorat. (Josée Boileau.)
  • ... le monde de M. Harper relève d'abord d'un agenda à contrôler. Et ces lointaines bombes ont déjà bien assez perturbé le plan de match du premier ministre...

Selon les ouvrages québécois que j'ai sous la main - le Multidictionnaire, Le français au bureau, le Dagenais, le Colpron et le Chouinard -, agenda est un anglicisme au sens d'ordre du jour ou de programme, ligne d'action.

De fait, ce terme est admis dans une seule acception, d'après le Petit Robert et le Lexis : «Carnet sur lequel on inscrit jour par jour ce qu'on doit faire, ses rendez-vous, ses dépenses, etc.» (Petit Robert) :

Tenir un agenda; écrire pour chaque jour ce que je devrai faire dans la semaine, c'est diriger sagement ses heures. (Gide, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Mon agenda est plein de choses importantes qui ne peuvent être différées. (Alain, dans le Lexis.)

Le Multidictionnaire ajoute que, par extension, agenda désigne aussi le «contenu d'un agenda»; le mot est dans ce cas synonyme d'emploi du temps :

Son agenda est bien rempli.

Line Gingras

«Silences éloquents» : http://www.ledevoir.com/2006/08/04/115160.html

2 août 2006

Mystifier sans détoner

Mystifier, mystify; détonant ou détonnant; détoner ou détonner; calque de l'anglais; anglicisme; usage; homonymes; orthographe.

  • Détonant parmi les autres, la position du premier ministre de la Colombie-Britannique, Gordon Campbell, a mystifié la délégation québécoise. Pour M. Campbell, Ottawa doit réduire ses impôts avant même de songer à augmenter les transferts aux provinces. (Robert Dutrisac.)

Non, la position de M. Campbell n'a pas explosé avec bruit; cependant elle détonnait, avec deux n, c'est-à-dire qu'elle n'était pas «dans le ton», en harmonie avec les autres. (Petit Robert.)

Le journaliste a-t-il du moins raison d'affirmer que cette position a mystifié la délégation québécoise?

Mystifier, d'après les dictionnaires de langue que j'ai sous la main, c'est tromper quelqu'un en abusant de sa crédulité, en général pour s'amuser à ses dépens :

J'avais été mystifié comme un collégien. (Louÿs, dans le Petit Robert.)

Ce fraudeur a mystifié mon voisin : il l'a roulé. (Multidictionnaire.)

Quand Baudelaire arriva à Bruxelles, il commença par mystifier les Belges en propageant le bruit qu'il avait des moeurs spéciales et qu'il appartenait à la police. (Thibaudet, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Ce verbe peut signifier aussi, selon le Trésor, «abuser (une personne ou une collectivité) en déformant ou en embellissant la réalité)» :

L'opinion a été mystifiée par quelques journalistes. (Lexis.)

Le gouvernement a senti la nécessité de mystifier le bon peuple de France avec des mots nouveaux et de vieilles idées. (Balzac, dans le Trésor.)

Je ne pense pas, toutefois, qu'il soit question de tromperie dans la phrase à l'étude; il me semble plutôt que le verbe est utilisé, comme souvent l'anglais mystify, au sens de «déconcerter», «plonger dans la perplexité» (Meertens). Le Colpron signale d'ailleurs que résultat mystifiant est le calque de mystifying result : il faudrait parler d'un résultat déconcertant, déroutant.

Je proposerais d'écrire, en conséquence, que la position de M. Campbell a déconcerté, dérouté ou laissé perplexe la délégation québécoise.

Line Gingras

«Péréquation : "chacun pour soi"» : http://www.ledevoir.com/2006/07/28/114690.html

1 août 2006

Accoucher d'une inflexion

Construction du verbe accoucher; complément du verbe accoucher; accord du participe passé du verbe accoucher; grammaire française; syntaxe du français; orthographe d'accord.

  • Acte inexcusable, le bombardement de Cana aurait dû susciter de la part du Conseil de sécurité de l'ONU un sursaut autre que la timide inflexion dont il a accouchée. (Serge Truffaut.)

Le verbe accoucher, sauf lorsqu'il désigne l'action d'aider une femme à donner naissance à son enfant, se construit seul ou avec un complément d'objet indirect : au sens propre, une femme accouche d'un enfant; au sens figuré - et par plaisanterie, selon le Petit Robert -, on peut accoucher, par exemple, d'un mauvais roman, c'est-à-dire l'«élaborer péniblement». Je ne sais trop que penser de l'expression bizarrement imagée que je trouve ici - accoucher d'une inflexion -, mais une chose est certaine : le participe passé du verbe accoucher, employé avec l'auxiliaire avoir et n'ayant pas de complément d'objet direct, doit rester invariable.

* * * * *

  • ... des positions qui ne permettent pas d'entrevoir le silence des armes à très court terme.

    Au terme de son deuxième périple au Proche-Orient en une semaine...

À la fin de son deuxième périple...

* * * * *

  • Après trois semaines de bombardements, l'ONU a une fois encore fait la preuve de son incapacité à jouer sur les événements lorsqu'ils sont aussi violents que sanglants.

Je ne comprends pas bien cette comparaison : lorsque des événements font couler le sang, il va de soi qu'ils sont violents, non?

Line Gingras

«ONU désarmée» : http://www.ledevoir.com/2006/08/01/114908.html

31 juillet 2006

Avec quoi ça s'accorde?

L'accord du verbe séparé de son sujet; l'accord du verbe avec son sujet inversé; la relative explicative et la virgule; la proposition relative et la virgule; grammaire française; syntaxe du français; ponctuation; orthographe d'accord.

  • Mais une certitude demeure : les rôles de con, à l'image de Brice, semble__ toujours lui plaire... (Fabien Deglise.)

Le verbe ne s'accorde pas toujours avec ce qui vient juste avant : ici, «à l'image de Brice» n'est qu'une sorte de parenthèse servant à préciser ce qu'on veut dire par «les rôles de con»; ce sont eux qui semblent toujours plaire.

* * * * *

  • Autant d'avantages que lui procurent son statut de vedette_ dont il aime savourer chaque seconde avec sourire et humilité.

Il arrive aussi que le sujet soit placé après le verbe : le «statut de vedette» procure des avantages, et non l'inverse. Le contraire pourrait être vrai (certaines personnes sont célèbres en raison de leur fortune), mais alors on écrirait : Autant d'avantages qui lui procurent...

Par ailleurs, la relative introduite par dont ne détermine pas de quel «statut de vedette» il s'agit; elle n'introduit pas une information essentielle au sens de la phrase, mais accessoire. Nous n'avons donc pas affaire à une proposition subordonnée déterminative, mais explicative, qui doit être précédée de la virgule.

Line Gingras

«De bouffon à espion» : http://www.ledevoir.com/2006/07/18/113942.html

29 juillet 2006

C'est moi qui ne sait pas

C'est moi qui et l'accord du verbe; accord du verbe avec le pronom relatif qui ayant pour antécédent un pronom personnel; orthographe d'accord; grammaire française; syntaxe du français.

  • Comme bien d'autres choses incomprises, la péréquation demeure toutefois un «dossier» qui, s'il est mal ajusté, peut donner lieu à une forme de déséquilibre fiscal.

    «Et le déséquilibre fiscal, je tiens à dire que c'est moi qui ne sait pas ce que c'est», a dit le fédéral qui passait par là.
    (Jean Dion.)

Le verbe ayant pour sujet le pronom qui ne se met pas nécessairement à la troisième personne; il s'accorde plutôt avec l'antécédent du relatif - dans le cas présent, il s'agit du pronom moi, de la première personne du singulier : ... c'est moi qui ne sais pas...

Line Gingras

«Des nouvelles de tout le monde» : http://www.ledevoir.com/2006/07/29/114753.html

28 juillet 2006

Comité aviseur

Comité aviseur; calque; anglicisme; usage.

  • ... M. Dallaire craint toutefois que l'exercice n'ait pas reçu une oreille attentive de la part du comité aviseur. (Alexandre Shields.)

J'ai rarement rencontré le terme comité aviseur pendant la quinzaine d'années que j'ai passées dans l'administration fédérale. Une recherche au moyen de Google confirme qu'il est peu souvent utilisé dans la fonction publique canadienne : je trouve, dans les sites .gc.ca, un nombre d'occurrences beaucoup moins élevé pour comité aviseur que pour comité consultatif.

C'est heureux, parce que le Grand dictionnaire terminologique, le Multidictionnaire et le Chouinard condamnent comité aviseur : il s'agit en effet du calque de l'anglais advisory committee, qui se rend par comité consultatif.

Le mot aviseur ne figure ni dans le Petit Robert (2003), ni dans le Lexis, ni dans le Trésor de la langue française informatisé. Bien entendu, le journaliste aurait été forcé d'employer cet adjectif si ce dernier avait fait partie d'une appellation officielle; ce n'est pas le cas ici, toutefois, puisque le nom générique auquel il se rapporte, comité, est écrit avec une minuscule initiale.

Voilà un anglicisme qui paraît sorti de l'usage courant; tâchons de ne pas l'y ramener.

Line Gingras

«SOS Parc Orford revient à la charge» : http://www.ledevoir.com/2006/07/27/114599.html

26 juillet 2006

Les soldats sont imputables de leurs actes

Imputable; être imputable de ses actes; imputable appliqué à une personne ou à un groupe de personnes; usage.

  • Il serait en tout cas très étonnant que le président Bush accepte que les soldats américains soient imputables des actes qu'ils commettent sur le sol irakien et soient traduits devant les tribunaux irakiens. (Serge Truffaut.)
  • On se souviendra que, depuis l'offensive en Afghanistan, la position de l'administration n'a jamais changé : tout militaire américain est imputable devant la loi américaine.

Imputable veut dire «qui doit être attribué à quelqu'un, à quelque chose» (Multidictionnaire). Synonyme d'attribuable, il s'applique seulement à des choses, comme le montrent les nombreux exemples relevés dans les dictionnaires :

Accident imputable à quelqu'un (Petit Robert), au manque de sécurité (Trésor de la langue française informatisé).

Une faute imputable à la négligence. (Hanse et Blampain.)

Il n'y a là qu'un retard imputable à des défauts de transmission. (De Gaulle, dans le Lexis.)

L'insuccès ne pouvait être expliqué à ses yeux que par quelque faute très grave imputable à ses chefs. (Sorel, dans le Trésor.)

Ces abus ne sont imputables qu'à la mauvaise administration du pays. (Académie, dans le Trésor.)

Ce premier succès [...] était également imputable à la fermeté du commandement... (Joffre, dans le Trésor.)

L'attitude des Anglais dans l'affaire de Madagascar est, selon lui, imputable aux seuls militaires. (De Gaulle, dans le Trésor.)

Marie-Éva de Villers signale que l'on commet une impropriété en parlant de l'imputabilité d'un gestionnaire, d'un fonctionnaire, etc., au sens d'«obligation de rendre compte, reddition de comptes, responsabilité».

Une personne n'est pas imputable de ses actes, mais elle en est responsable; elle doit en rendre compte.

Line Gingras

«Sauver les apparences» : http://www.ledevoir.com/2006/07/26/114470.html

25 juillet 2006

Le régime qui les oppressait

Oppresser et opprimer; usage.

  • C'est d'ailleurs ce que Boyden a fait. Il s'est penché sur le sort de ces soldats amérindiens de la Grande Guerre qui, tout comme les Noirs américains au Vietnam et les tirailleurs sénégalais, ont poussé l'obligeance jusqu'à voler au secours du pays et du régime qui les oppressaient. (Louis Hamelin.)

Le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain signalent qu'il faut distinguer entre oppresser et opprimer. Oppresser quelqu'un, c'est lui causer une gêne dans ses fonctions respiratoires ou, au figuré, l'«étouffer sous un poids, une angoisse» (Multidictionnaire); opprimer quelqu'un, c'est le «soumettre à une autorité excessive et injuste», le «persécuter par des mesures de violence» (Petit Robert) :

Il me semblait que l'intensité des ténèbres m'oppressait et me suffoquait. (Baudelaire.)

Christophe voulait parler, une angoisse l'oppressait. (Rolland.)

Il fut l'homme qui frappe, opprime, égorge, exile... (Hugo.)

Opprimer un peuple, les faibles. (Petit Robert.)

Line Gingras

«La chair humaine» : http://www.ledevoir.com/2006/07/22/114227.html?338

24 juillet 2006

Comment ça coûte?

Comment ou combien; comment ça coûte ou combien ça coûte; à coup de ou à coups de; grand-frère; la proposition relative explicative et la virgule; usage; orthographe; ponctuation.

  • Comment ça coûte, une guerre, quand elle débarque chez vous? (Éric Desrosiers.)

Comment est un adverbe de manière, et non pas un adverbe de quantité. J'ai déjà entendu comment ça coûte, mais il me semble que c'était dans la langue populaire; l'emploi comme adverbe de quantité ne figure même pas dans le Petit Robert (édition 2003). Normalement, on demande combien ça coûte.

  • Son centre-ville, rebâti à coup de milliards ces dix dernières années, et hier encore bourdonnante d'activités, a des allures de ville fantôme.

C'est le centre-ville, d'après la structure de la phrase, qui était bourdonnant d'activités. Je mettrais par ailleurs activité au singulier, mais le pluriel ne me paraît pas condamnable.

D'après le Hanse-Blampain, on écrit à coups de (et non pas à coup de) :

À coups de bâton, à coups de dictionnaire.

Le Petit Robert reçoit cependant les deux graphies, sans établir de distinction :

Il se maintient à coup de médicaments.

Les universités se disputent les professeurs à coups de billets de banque. (Duhamel.)

Et je lis dans le Girodet un point de vue différent des deux premiers : «Au sens figuré, on écrira traduire un texte à coups de dictionnaire (en se servant souvent du dictionnaire), mais acquérir quelque chose à coup de billets de banque, à coup de dollars

J'écrirais à coups de, mais je ne pense pas que l'on puisse refuser le singulier.

  • Il faut dire que l'on reçoit un sérieux coup de pouce du grand frère américain_ qui donne en moyenne chaque année deux milliards en aide, dont les deux tiers en assistance militaire.

On écrit grand-frère, avec un trait d'union. Et comme il n'y a qu'un seul grand-frère américain, la subordonnée relative qui suit ne sert pas à désigner celui dont il est question, à le distinguer d'un autre grand-frère américain, moins généreux - ce serait dans ce cas une subordonnée relative déterminative -, mais à expliquer ce qu'on entend par le segment de phrase qui précède; il s'agit donc d'une subordonnée relative explicative, laquelle doit être précédée de la virgule.

Line Gingras

«Perspectives - Le prix de la guerre» : http://www.ledevoir.com/2006/07/24/114323.html?338

22 juillet 2006

Nécessiter

Le sujet du verbe nécessiter; place de l'antécédent du pronom relatif; grammaire française; syntaxe du français.

  • À peine une quarantaine de personnes, qui n'avaient nulle part où aller, ont nécessité le soutien d'urgence offert par la Croix-Rouge, dont la moitié étaient en transit vers une autre ville du Canada. (Lisa-Marie Gervais.)

Non, ce n'était pas la moitié de la Croix-Rouge qui se trouvait en transit (et encore moins le soutien d'urgence), mais on le dirait à première vue; voilà pourquoi il est toujours souhaitable, afin d'éviter une ambiguïté même passagère, de placer le pronom relatif près de son antécédent.

Selon le Petit Robert et le Hanse-Blampain, le verbe nécessiter doit avoir pour sujet un nom de chose.

Je verrais plusieurs façons de se tirer d'embarras :

À peine une quarantaine de personnes, dont la moitié étaient en transit vers une autre ville du Canada, n'avaient nulle part où aller et ont eu recours au soutien d'urgence offert par la Croix-Rouge ou n'avaient nulle part où aller et ont eu besoin de l'aide d'urgence offerte par la Croix-Rouge.

À peine une quarantaine de personnes, dont la moitié étaient en transit vers une autre ville du Canada, ont eu recours au soutien d'urgence offert par la Croix-Rouge parce qu'elles n'avaient nulle part où aller ou ont eu besoin de l'aide d'urgence offerte...

À peine une quarantaine de personnes, qui n'avaient nulle part où aller, ont eu recours au soutien d'urgence offert par la Croix-Rouge ou ont eu besoin de l'aide d'urgence offerte par la Croix-Rouge; la moitié étaient en transit vers une autre ville du Canada.

Line Gingras

«Entre soulagement et frustration» : http://www.ledevoir.com/2006/07/22/114303.html

21 juillet 2006

À cent lieux

À cent lieues; à cent lieux; lieues et lieux; lieue et lieu; homonymes; orthographe d'usage.

  • Le premier ministre canadien semble en effet avoir choisi d'étouffer toute critique à l'égard du président américain. L'attitude de Stephen Harper est à cent lieux, par exemple, du soutien critique d'Angela Merkel. (Christian Rioux.)

On trouve plus de quatre-vingts lieux de pèlerinage au Québec*. Vous seriez à cent lieues de le croire que cela n'y changerait rien.

* http://www.patrimoine-religieux.qc.ca/pelerinage/pelerinagef.htm

Line Gingras

«Perspectives - Des relations plutôt tièdes» : http://www.ledevoir.com/2006/07/19/114026.html?361

20 juillet 2006

Loger un appel

Loger un appel; plan de contingence; présentement; anglicisme; calque; régionalisme; usage.

  • ... des appels logés par les Canadiens depuis le Liban... (Bernard Descôteaux.)

Qu'il soit question d'un appel en justice ou, comme c'est le cas ici, d'un appel téléphonique, on commet un anglicisme, selon Marie-Éva de Villers, en utilisant le tour loger un appel. De fait je ne vois rien dans le Petit Robert, à l'article «loger», qui autorise cet emploi.

  • Toutes les grandes entreprises ont ce qu'on appelle des plans de contingence pour parer aux situations qui pourraient interrompre leurs activités.

D'après le Grand dictionnaire terminologique, plan de contingence est un calque de l'anglais. René Meertens, dans son Guide anglais-français de la traduction, propose de rendre contingency plan par plan d'intervention (en cas d'urgence), plan d'urgence, plan de secours; il donne d'ailleurs cet exemple, dont pourrait s'inspirer à l'avenir notre bon gouvernement :

Il existe un plan d'urgence prévoyant l'évacuation de la zone.

  • Présentement, les autorités canadiennes font tous les efforts qu'ils peuvent dans les circonstances.

Je ne vais pas critiquer l'adverbe présentement. Il ne me paraît pas sans intérêt de savoir, toutefois, que son emploi est «courant au Québec», mais «vieilli dans le reste de la francophonie*» (Multidictionnaire).

* Je vous invite à consulter les commentaires pour des observations à ce sujet.

  • Ce n'est pas la première fois que la réaction du gouvernement pour venir en aide à des citoyens canadiens se trouvant en danger à l'étranger tarde à venir.

Je suggérerais :

Ce n'est pas la première fois que le gouvernement tarde à venir en aide à des citoyens canadiens se trouvant en danger à l'extérieur du pays.

  • Dans la situation actuelle, il faut faire la part des choses dans tout ce qui est dit et écrit. Certes, il faut comprendre l'émotion ressentie par ces personnes qui attendent un bateau pour les éloigner de Beyrouth.

Dans la situation actuelle, on doit faire la part des choses...

Line Gingras

«Opération sauvetage» : http://www.ledevoir.com/2006/07/20/114045.html

19 juillet 2006

Une membre de la famille

La membre, le membre; une membre, un membre; membre, masculin ou féminin; genre du nom membre.

  • Il faisait ainsi allusion aux propos qu'une membre de la famille canadienne décimée a tenus en conférence de presse lundi, à Montréal. (Clairandrée Cauchy et Alexandre Shields.)

Le mot membre «ne comporte pas de forme féminine», ainsi que le fait observer Marie-Éva de Villers. Ce nom est toujours employé avec un déterminant - article, ou adjectif possessif, démonstratif, interrogatif ou indéfini - masculin. Songeons que c'est exactement l'inverse pour le mot personne.

Line Gingras

«Harper demeure inébranlable» : http://www.ledevoir.com/2006/07/19/114022.html

17 juillet 2006

Faire application pour un amendement à la loi

Faire application, appliquer; amendement ou modification; anglicisme; usage.

  • Olson avait déjà fait application pour une libération conditionnelle après 15 ans de peine, en 1996, mais sa requête avait été rejetée en 15 minutes par la Commission. (PC.)

J'ai la certitude que tous les étudiants en traduction, au Canada, apprennent à éviter faire application, calque de to make an application. Ce terme est fréquemment utilisé (de même que appliquer) au sens de «poser sa candidature», «postuler un emploi», «présenter une demande d'emploi»; la faute est signalée par des ouvrages canadiens comme le Multidictionnaire, le Colpron, le Dagenais et le Chouinard.

Une vérification dans le Petit Robert confirme que appliquer et application ne possèdent aucune acception se rapprochant d'une demande quelconque.

* * * * *

  • La semaine dernière, le ministre fédéral de la Justice, Vic Toews, indiquait que le gouvernement envisageait de nouveaux amendements au Code criminel dans le cas des meurtriers en série.

J'ai déjà eu l'occasion de parler du verbe amender : on amende un projet de loi, on modifie une loi. Les substantifs amendement et modification s'emploient de façon correspondante.

Line Gingras

«Les proches des victimes d'Olson prient pour qu'il reste en prison» : http://www.ledevoir.com/2006/07/17/113867.html

14 juillet 2006

Stimuler des images

Stimuler; les milles et une ou les mille et une; usage; orthographe.

  • Installé sur une terrasse ensoleillée, je me laisse emporter par la magie de cette boisson qui me rappelle les cigales, l'accent, la brise, l'accordéon, le bouquet des milles et une plantes et fleurs, la garrigue et surtout la vie toute provençale. (Jean-François Demers.)

Vingt milles à pied, ça use, ça use...

Eh! oui, ça use les souliers; cependant il n'est pas question de milles ni de kilomètres, ici, mais plutôt de l'adjectif numéral, toujours invariable.

* * * * *

  • Évidemment, les deux pieds sur le trottoir de la rue Saint-Denis, ça prend plus qu'un verre de pastis pour stimuler toutes ces images. Mais, n'empêche, ce cocktail n'a pas son pareil pour célébrer cette douce France.

Stimuler quelqu'un, c'est lui donner de l'énergie, de l'ardeur; l'inciter, le pousser à agir :

Je marchais rapidement, pénétré et comme stimulé par ce bain de lumière, par ces odeurs de végétations naissantes. (Fromentin, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Stimulés par la nécessité, nos alliés poussèrent la construction de leurs voies ferrées autour de la mer Blanche. (Joffre, dans le Trésor.)

Avec pour complément un nom de chose, stimuler s'emploie dans le domaine économique :

Stimuler l'industrie. (Lexis.)

Il peut aussi s'appliquer à une fonction organique :

Le grand air stimule l'appétit. (Petit Robert.)

Ou encore à une faculté, une disposition d'esprit, un sentiment :

[Les espérances] stimulèrent son amour-propre sans lui donner l'orgueil. (Balzac, dans le Petit Robert.)

De l'hôpital, j'avais couru à la prévôté stimuler le zèle des gendarmes. (Vercel, dans le Trésor.)

Le sport [...] stimule l'esprit d'association, la loyauté dans les combats... (Morand, dans le Trésor.)

Stimuler les imaginations. (Trésor.)

Un verre de pastis, ou deux, ou trois, cela peut sans doute stimuler l'imagination - à supposer qu'elle ait besoin d'aide pour évoquer toutes ces images de lieux aimés.

* * * * *

  • ... adapter les heures d'ouverture des SAQ différentes aux besoins des quartiers.

Je crois qu'on a voulu parler des différentes succursales de la SAQ (Société des alcools du Québec).

Line Gingras

«Le pastis du 14 juillet» : http://www.ledevoir.com/2006/07/14/113597.html?338

12 juillet 2006

Ils mériteraient de faire un effort

Mériter; rendu public, accord; orthographe; usage.

  • ... l'enquête de Statistique Canada, dont les résultats ont été rendu_ publics hier. (Fabien Deglise.)

Rendre public ne forme pas une locution invariable; les deux éléments prennent la marque du féminin ou du pluriel, s'il y a lieu. Dans le cas présent, le verbe rendre est employé avec l'auxiliaire être; son participe passé s'accorde donc, tout comme l'adjectif attribut public, en genre et en nombre avec le sujet du verbe : les résultats ont été rendus publics.

* * * * *

  • Par ailleurs, la province se distingue aussi avec 53,5 % des répondants de la province qui affirment manger des plats préparés à la maison...

On peut facilement éviter la répétition : le complément de la province est superflu.

* * * * *

  • C'est qu'avec une consommation de fruits et légumes évaluée à 4,96 portions, selon les données de Statistique Canada, ils mériteraient, croit la diététiste, de faire un effort supplémentaire pour atteindre les 5 à 10 portions recommandées actuellement par le Guide alimentaire canadien.

Mériter, en parlant d'une personne, c'est «être digne d'une récompense ou passible d'un châtiment» (Multidictionnaire) :

Que faisons-nous pour mériter un tel honneur? (Bazin, dans le Lexis.)

Je ne suis pas sûr de mériter ce reproche. (Mauriac, dans le Lexis.)

Il avait mérité la maison de correction. (Aragon, dans le Petit Robert.)

M. Noyer inscrivait les notes méritées par ce mauvais élève. (Green, dans le Trésor de la langue française informatisé.)

Il mérite qu'on ait pour lui des égards. (Hanse et Blampain.)

Cet élève mérite de réussir. (Petit Robert.)

Dans la phrase à l'étude, le verbe n'est pas utilisé dans ce sens : faire un effort pour manger davantage de fruits et de légumes, ce n'est ni une récompense ni un châtiment, même si certains n'aiment peut-être pas les carottes ou les choux de Siam. On a voulu dire plutôt devoir, avoir avantage à, avoir intérêt à :

C'est qu'avec une consommation de fruits et légumes évaluée à 4,96 portions [...] ils auraient avantage, croit la diététiste, à faire un effort supplémentaire...

Line Gingras

«Le goût du gras» : http://www.ledevoir.com/2006/07/07/113178.html

11 juillet 2006

Des révolutions oranges

Orange, accord de l'adjectif de couleur; accord du participe passé employé avec l'auxiliaire avoir.

  • L'année n'avait que quelques heures à peine que Moscou interrompait son approvisionnement en gaz naturel de l'Ukraine parce que celle-ci rechignait à des hausses de prix, et peut-être bien aussi pour lui apprendre à faire des révolutions oranges sans son autorisation. (Éric Desrosiers.)

D'après le Petit Robert, le Multidictionnaire et le Hanse-Blampain, orange, adjectif de couleur, est invariable.

On pourrait toujours changer de teinte - avec une révolution verte on serait tranquille, et on prouverait en outre, s'il en est besoin, que l'Ukraine, au même titre que le Québec, est une société distincte, que dis-je une nation (faudrait pas lui imposer la poutine, quand même) -, mais ce n'est pas de mon ressort.

* * * * *

  • ... on ne pouvait pas ne pas penser que ces feux d'artifice auraient saluer aussi le départ du maestro Zidane... (Pierre Foglia.)

Monsieur Foglia a-t-il voulu écrire auraient saluer? Je constate qu'il a employé seulement l'auxiliaire avoir, ce qui exclut la forme infinitive - ainsi qu'on le voit très bien si l'on remplace saluer par un verbe en -ir :

Ces feux d'artifice, en d'autres temps, auraient réjoui les admirateurs de Zidane. (Exemple forgé.)

* * * * *

  • Quels calculs, quelles supputations ont-ils fait_, l'un et l'autre?

Ils ont fait quoi? des supputations, des calculs. Le participe passé employé avec l'auxiliaire avoir, on le sait, s'accorde en genre et en nombre avec le complément d'objet direct, si celui-ci précède le verbe :

Quels calculs, quelles supputations ont-ils faits, l'un et l'autre?

Line Gingras

«Perspectives - Le mauvais élève» : http://www.ledevoir.com/2006/07/10/113292.html?338
«La défaite de Zidane» : http://www.cyberpresse.ca/article/20060710/CPSPORTS/60710006/0

Archives